27 janv. 2012

Au revoir Québec, mon amour

Les nuits polaires
Dorval, vendredi, 27 janvier 2012.  La neige s’accumule sur l’avion.  Les charrues tracent des sillons lumineux sur la piste.  Je croise les doigts pour que notre liaison Montréal-Paris ne soit pas retardée.  Il faut compter 28 heures de vols et 6 heures et demi d’escale pour atteindre la Nouvelle-Calédonie :  les retards sont vraiment de trop dans cette équation.

Nous sommes partis ce matin avec quatre valises trop lourdes.  Il n’y avait plus un centimètre de libre dans le coffre.  La neige neigeait sur le boulevard St-Maurice, gommant le caractère prolo du quartier.  Nous avons passé dix jours merveilleux dans un vieil appartement surchauffé, enroulés dans nos écharpes de laine, traînant nos savates jusqu’à la cuisine pour se faire un thé chaud.  

Frigorifique dehors, très très chaud dedans.  C’est comme ça que j’aime l’hiver.  Tout se déchaîne et la vie continue en pantoufles.

Il y a eu les amis, les soupers arrosés, les séances toniques de shopping (et la carte de crédit qui chauffe!), les retrouvailles suivies des au revoir larmoyants.  Les rires et les larmes. Sucré, salé.

Les beaux moments :  un cracheur de feu sur la rue Des Forges qui éclaire la nuit glaciale avec ses crachats en arc-en-ciel.



Autre beau moment :  perdue au milieu d’une forêt, je cherche une adresse au milieu de nul part.  J’étais pourtant à 20 minutes de chez-moi.  

Les autres « plus » :  voir mes enfants avec leurs amis.  Surprendre le regard humide de mes aînés en amour.  Traîner ma mère dans une discothèque à la mode.  Boire du vin et rire gras avec mes anciens collègues de travail.  Du bonbon.

24 janv. 2012

L'épreuve du passeport, un sport extrême

Je jette un œil distrait sur la liasse de paperasse enfouie au fond de mon sac à main et déjà, je baille aux corneilles.  Renouvellement des passeports.  C’est le passage obligé de tout citoyen d’avoir à inscrire les bribes de sa vie, nom-prénom-adresse-alouette, avec l’application d’un élève de 2e année qui fait des mots croisés.  Encore aujourd’hui, je me demande comment j’ai fait pour monter et descendre l’Everest des formulaires d’adoption.  Une montagne de plaisir…

Il s’agit en effet d’une grande épreuve sportive.  J’écris très proprement  avec de jolies barres sur les « T » et des « S » bien rebondis mais cela ne suffit pas à masquer mon trouble d’inattention chronique.   C’est le commis de services Canada qui m’a révélé que j’étais une cancre finie en paperasse 101. 

« Vous êtes le parent requérant?  Donc, n’indiquez pas que vous êtes la mère de l’autre parent ou tuteur… »

Oups, j’ai lu trop vite.  Je ne suis pas la mère de mon chum.  Quoique…

« Et ici, vous avez inscrit 1994 comme année de naissance…Vous êtes bien sûr que c’est votre année de naissance? »

Bon, bon… J’ai inversé le 9… C’est 1964, d’accord!  Madonna a bien 55 et elle en paraît à peine 22.  Dans son cas, ça aurait pu passer.  Mais je ne suis pas Madonna, loin de là.

Si seulement ce n’était que ça… Il faut aussi traverser l’épreuve d’habileté en signant son nom dans la case à cet effet.  Sans toucher aux lignes sinon c’est comme marcher sur les craques du trottoir :  tu meurs.  Sur une famille de 5, combien sont tombés sur ce champs miné?  Deux! 

 « Le « G » de Champagne touche légèrement le bas de la case », m’informe Monsieur services Canada avec l’œil collé dans sa loupe d’entomologiste.  Un hochement de tête et on sait qu’on a un formulaire au panier.  Scrappé.  Tout ça pour un moignon de lettre qui effleure une ligne.  

Et ça ne s’arrête pas là.  La photo passeport de Princesse des îles subit le même sort.

«Cette photo sera rejetée.  La ligne de cheveux déborde un tout petit peu quand on appuie le cadre sous le menton » 

Et moi je déborde d’enthousiasme face à ce nouveau projet qui consiste à retourner chez le photographe.  Youppi-dou!

Je me présente au comptoir non sans avoir cultivé mon petit côté paranoïaque-qui-ne-laissera-rien passer.   Pauvre commis! 

« Il me semble qu’il y a un léger reflet sur cette épreuve…Êtes-vous sûr qu’elle va passer le test des agents secrets de passeport Canada? ».  La suspicion est une maladie qui s’attrape et je pense que je commence à sympathiser avec mon nouvel ami de services Canada.  C’est un king et je suis devenue son émule.

« Attendez, on va appliquer un peu de poudre », dit-il en ouvrant son petit pot débordant d'un blanc laiteux.   Le regard de Princesse des îles s’arrondit de stupéfaction. 

« Ben là, maman, c’est une blague? », demande-t-elle incrédule.  Sa jolie peau chocolatée ne va pas du tout avec ce fond de teint destinée à une suédoise blafarde.

Mais dans la catégorie "erreur la plus craquante", c'est Chéri qui remporte la palme.  Il a inscrit « BRUN » dans la case couleur de cheveux.  En relisant son formulaire, j’éclate de rire.

« Princesse des îles, maman a une question pour toi :  quelle est la couleur des cheveux de papa? »

Et elle me crie du fond du salon alors qu’elle a encore le nez collé sur le mini-écran de son Ipod :

« Gris! »  Et oui.  Ils sont gris.  Ils ont changé de couleur.  Et c’est pour ça qu’on doit renouveler les maudits formulaires.

Les belles d'autrefois



19 janv. 2012

Une vraie vie de chien!

Il fait un temps à ne pas mettre un chien dehors.  Demandez à César ce qu’il en pense!  Ce n’est pas un manteau de dandy doublé en mouton qui va lui faire aimer l’hiver.  Le beagle se serait bien passé de cette petite promenade à moins 15 dans le corridor frigorifié de la rue Des Forges, là où la froidure humide du fleuve s’engouffre pour vous geler les babines.    S’il pouvait se couvrir avec ses propres oreilles, il le ferait dans la minute pour se protéger du sifflement coupant du vent.  Après tout, le ridicule ne tue pas…ces bottillons sanglés n’en sont-ils pas la preuve?  Pratique pour éviter la brûlure du gros sel sur le trottoir mais si peu seyants sur les courts jambonneaux d’un beagle. 

Rien à voir avec Snoopy-sans-souci sous un ciel floconneux… Quelle arnaque digne d’Hollywood de faire croire ainsi que l’hiver est un bain de soleil pour tous les chiens crétins juchés sur une niche.   Joe Cool en lunettes fumées sous la neige, tout nu dans son pelage… Aussi peu crédible que peut l’être un beagle nommé Snoopy!

Suis-je heureux de faire une promenade avec mon maître dévoué? Rien qu'un coup d'oeil sur mon regard fou d'enthousiasme et vous décoderez.   Sortez la camisole de force en mouton, je vais lever la patte sur deux ou trois poteaux gelés.


Vivement le printemps et les écureuils!  Si l'homme a eu la brillante idée d'inventer les vêtements canins pour affronter l'hiver, il aurait poursuivre sur sa lancée créative et nous fournir aussi les tout-inclus dans le sud pour passer à travers le maudit hiver!

17 janv. 2012

10 raisons pour ne pas hurler quand il fait moins 25

Un grand latte, version commande à l’auto, pour se réchauffer les mains  

Le scrouch-scrouch de la neige comme des corn flakes qui éclatent sous les semelles  

La lumière.  Divine tellement elle est partout.

Le pyjama incognito sous le jeans

Pelleter pour se réchauffer.  Utile et ludique.

La cérémonie du grand emballage : pulls, foulards, tuque, chaussettes

Trois-Rivières-Montréal en char, le chauffage dans le tapis, en écoutant le Sportnographe à Radio-Canada

Raclette + vin + amis

Se laisser envoûter par la brume fantomatique sur le fleuve

 Voir scintiller « moins 25 » sur un panneau lumineux et se dire qu’on est un vrai gaulois pour endurer ça…  

3 janv. 2012

                      

Il y a des jours où mon divan devient mon meilleur ami.  Je m’y échoue pendant quelques heures pour lire, boire un verre de vin, écrire ou rêvasser en regardant dehors.  C’est mon île, mon point d’ancrage, ma grotte, mon petit bout de plage au milieu du salon. 

N’est-ce pas sur un canapé qu’on épanche ses angoisses auprès d’un psy?  Un meuble-doudou pour passer un coup de blues, moucher ses chagrins, maudire et médire en se calant au creux des coussins.   Une séance et hop! c’est terminé.  On ramasse les vieux mouchoirs roulés en boule et la vie continue.  Il faut savoir s’extraire du divan et repartir du bon pied. 

Le divan que je fréquente fait face à la télé mais curieusement, elle n’est jamais allumée lorsque je suis ici en mode solo.  Je préfère mes rêves aux émissions qui défilent.  C’est sur un divan que j’ai imaginé vivre à l’étranger avec mon mari et mes trois enfants.  N’allez pas croire que je traînasse sur mon trône en allant nulle part!  J’ai fait plusieurs fois le tour du monde enroulée dans le châle de ma regrettée belle-mère.  J’ai nourri ce désir de partir comme s’il s’agissait d’un chat perdu qui a fini par ne plus jamais me quitter.  Cette envie qui m’a toujours tenaillée, paqueter mes petits pour vivre simplement sur une île à l’autre bout du monde. Apporter l’essentiel  mais toujours conserver le divan, histoire de continuer à s’inventer des vies.

En version semi-allongée, je m’imagine mal en train de m’encarcaner dans une série de résolutions.  Oui, je vais continuer à courir mon petit 5 km.  Oui, je vais me chercher une job.  Oui, je vais manger des fibres.  Oui, je vais rester zen avec mes ados.

C’est bon?

Ma seule résolution, c’est la suivante :  je veux retrouver mon divan de temps en temps pour mettre entre parenthèse cette vie qui défile trop vite.  M’assoir en bouddha et bénir la fonction « pause » sur les gadgets techno.  Un divan pour admirer le pointillé intriguant de nouvelles constellations sous des cieux australs.  Un divan pour plonger dans mes souvenirs bleu Calédonie ou grand blanc Québec.  Un divan pour espérer y bercer un jour les enfants de mes enfants. 

En 2012, je vous souhaite un divan aussi grand et moelleux que le mien.