Équitation pour les nuls
Je m’attelle à un nouveau sport : l’équitation.
« C’est pas un sport! », me fait remarquer Chéri. « C’est le cheval qui fait tout le travail, toi tu fais la promenade! »
« … »
Mieux vaut se taire lorsque le mâle Alpha énonce une énormité. L’équitation EST un sport. Je l’ai senti au lendemain de ma première leçon. C’est comme si j’avais fait de la bicyclette sur un Harley Davidson à pédales. Ouch! Et à y regarder de plus près, j’avais même des bleus. J’ai passé deux jours à grimacer. Mais je ne lance pas la serviette : je veux faire du cheval sans avoir l’air ridicule.
Pourquoi s’infliger pareil supplice? Parce que dans cette région de la Calédonie, on est comme à St-Tite. Il y a plus de chevaux que de personnes au mètre carré. Je veux faire une promenade avec Clopinette et Princesse des îles sans les entendre rire dans mon dos. Maman est cool. Maman peut manier la bride avec la désinvolture de John Wayne. Allumez moi une Malboro quelqu’un et je pars au galop.
Si vous venez vous établir dans mon patelin, je vous encourage à vous inscrire au cours du mardi matin. C’est la séance « Équitation pour les nuls ». J’adore. On part au pré pour ramener son cheval après lui avoir passé le licol. Soyez ferme avec votre monture parce que vous allez vite penser que cette chose inerte qui ne bouge pas d’un poil est un âne. Ils ont tous leur petit travers : si c’est Clin d’œil, il faut chanter pour l’amadouer. Si c’est Bounty, le gros qui fait la loi dans le pâturage, il faut avancer vers lui comme si on était dans un ring de boxe. Si c’est Ohio, faites vous à l’idée, il donne des coups de tête. Vous finirez tous par espérer monter Benji ou Imprévu comme si votre vie en dépendait mais vous aurez rarement cette chance. On ne gagne pas toujours à la loterie de la monture de choix. C’est comme ça.
Une fois sorti du pré, eh bien…vous n'êtes pas sorti de l’auberge! Vous devez faire la petite toilette de votre cheval avant de le seller. Comme par hasard, vous tombez toujours sur le plus crotté du lot. Brosse, brosse, brosse…Il me semble qu’il me pousse du poil sur les dents juste en l’évoquant tellement ça fait une poussière incroyable. Après, il faut passer le mors. Tu ouvres la gueule du cheval, comme ça…Oui, tu lui fous tes doigts entre les babines pour lui titiller la dentition en espérant qu’il ne te broie pas les phalanges. Facile!
Ensuite, tu poses le tapis sur son dos et la selle qui vient par-dessus. Pas trop en avant, pas trop en arrière, laisse un poing pour la croupe et chante Hallelujah de Leonard Cohen sans fausser. Voilà, ton cheval est prêt.
Ah, non…Pas tout à fait. Il faut lui décrotter les sabots. Une opération délicate alors qu’il faut empoigner le sabot, gratter, souffler et souffrir.
La leçon peut maintenant commencer. Et merde! Je suis à bout de souffle et trempée de sueur alors que mon cheval est frais comme une rose.
On se dirige vers la carrière d’entraînement, un corral au pied du Koniambo.
Difficulté no. 1 : mettre le pied à l’étrier. Si vous avez comme moi un joli galbe mais une jambe somme toute trop courte, vous aurez l’air du nain dans Love Boat qui essaie d’enfourcher une girafe. Ce n’est pas très élégant.
Gaffe no. 1 : vous oubliez de bien resserrer les sangles de la selle du cheval. Alors là, c’est le burlesque à son meilleur! Vous êtes accroché au flanc de l’animal, inconsciente d’avoir fait glisser la selle parce que vous cherchez encore le mode d’emploi.
Défi de tous les instants : passer au trot sans avoir l’air d’un vulgaire pop corn sautillant sur votre monture. Vous compter un- deux, un-deux… Ça va pendant un demi tour mais le tempo finit toujours par se déglinguer et vous voilà reparti avec votre bombe de travers sur la tête à rigoler comme une gamine.
L’heure passe très vite. On redescend du cheval avec l’impression d’être passé dans un car wash tellement on est lavé et vidé de toute énergie.
Il faut cependant puiser dans vos réserves…pour desseller votre monture. Et vous voilà encore avec la brosse à vous faire pousser du poil sur les dents!
Ça paraît éreintant? C’est pourtant un grand bonheur auquel je m’adonne à toutes les semaines.
Je reviens à la maison fourbue, crottée comme un cheval qui sort du pré et profondément satisfaite des progrès que je fais. Je suis moins ridicule à cheval aujourd’hui que je ne l’étais hier. C’est un pas en avant.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire