Délia, animatrice-radio à Calédonie 1ère,
débarque sur la plage avec son micro pour les vox pop destinés à une chronique
rigolote sur la langue française. Elle
se pointe généralement le mercredi à la Baie des Citrons. Tout le monde connaît Délia et son rire en
cascades. Elle surgit alors
que j’ai le popotin vissé sur le bout de ma micro-natte, un livre ouvert sur le
pif, faisant la sieste ni vue ni connue.
Quelle flemmarde je suis! C’est à ce moment que Délia se pointe, curieuse comme une belette avec ses 36
questions. Sa bonne humeur contagieuse
me tire à tous coups de ma léthargie et on finit par papoter comme des
mémères.
Le concept est simple :
une série d’expressions pour laquelle je dois trouver une explication
socio-historico-culturelle puisée à même le riche lexique de la langue
française.
« D’où vient l’expression casser sa pipe? », demande-t-elle avec son invariable sourire
dans la voix.
Et moi, grosse patate, je me dépatouille comme je peux pour masquer mon ignorance. Dis-moi, Délia, qu’est-ce que ça veut dire?
« Sur les champs de batailles des guerres napoléoniennes, les
chirurgiens n'ayant pas d'anesthésiant pour opérer, plaçaient une pipe en terre
cuite entre les dents du patient pour qu'il la morde au lieu de crier. Le
soldat qui succombait au cours de l'opération laissait tomber sa pipe par terre
où elle se cassait »
Et dire que
je l’avais sur le bout de la langue…
« et chaud lapin? Et avoir
le bourdon? Et ce n’est pas à un
singe qu’on apprend à faire des grimaces? ». Elle n’est jamais à court, la Délia. Donnez lui un zoo et elle vous dégottera une
expression pour chacune des peluches qui s’y trouvent. J’en perds mon latin. Bouche bée.
Plutôt que de faire l’autruche, je lui ponds des explications
saugrenues. Rien n’y fait, mes
définitions excentriques ne la découragent pas.
Il lui faut bien une tête de turc dans son show de radio. Chère Délia, s’il y a un poste de fou du roi
à ton émission, tu penses à moi.
Sache que j’ai dans ma besace quelques perles du terroir qui
ne sont pas
piquées des vers. Tu ne m’en
voudras pas si je les décline en québécois?
Quand on baragouine de midi à quatorze heures, on risque de
s’épivarder pis de dire ben des niaiseries.
Faut pas s’énerver le poil des jambes et respirer par les narines. Profondément.
Mets tes barniques ben carré sur ton nez pis regarde moi quand je me
lâche lousse en parlure québécoise.
bazzotv.telequebec.tv |
Un chaud lapin, ma chère Délia, ça pourrait être un Gino
Camaro. À condition que les bottines de
notre Gino suivent les babines et ce n’est pas toujours le cas. Le Gino, il préfère chauffer son char et
péter de la broue avec son foin dans les clubs.
Boire des drinks avec les pitounes.
Pis rentrer chez lui la kékette sous le bras parce qu’il est rond comme
une binne. Bonsoir le chaud lapin!
Avoir le bourdon, c’est faire la baboune. Quand tu files comme ça, tu te fiches de tout
comme dans l’an quarante. Pourquoi l’an
quarante? Encore une autre de nos
expressions capotées qui pourra te faire paraître comme une fille avec ben de
la jarnigoine si jamais tu réussis à coincer ça dans une conversation!
Et ma préférée :
ce n’est pas à un singe qu’on apprend à faire des grimaces…Notre premier
ministre, Jean Charest, est en train de s’étouffer avec celle-là. Tu dois être au courant, Délia, la nouvelle a
fait le tour de notre planète : la
jeunesse québécoise est en beau joual vert parce qu’on veut leur en passer une p’tite
vite en augmentant les frais de scolarité.
Y’a de quoi manger ses bas quand tu négocies avec des faces à claques
qui bizounent des ententes sur le coin d’une table. Faque les jeunes ont décidé de
bardasser. Du béding-bédang pendant 15
semaines. Ça a fini par venir à bout de
la patience du gouvernement. Charest a
dit , « ça va faire, ma gang de malades, on vous plante une loi
spéciale. Plus le droit de manifester
avec les guéguettes en l’air partout dans la ville! »
Le gouvernement pensait s’en sauver. « Ce n’est pas à un singe qu’on apprend
à faire des grimaces… » Ben quoi, les
lois spéciales, on a déjà vu ça pour clouer le bec des grévistes. Mais une de même, c’était une vraie vingnenne. Pas vargeux.
Y’a ben des citoyens qui avaient le moton. Les jeunes, les vieux, les enfants…Tout le
monde a sorti son chaudron pour tapocher ben fort dessus. "Faut pas lâcher la patate", qu’ils se disent. Soir après soir, pas pissou pour deux cennes,
ils sortent dans les rues. « Slaque
la poulie, Monsieur Charest! Fais en des grimaces, nous on va t’étriver avec
nos slogans. Attache ta tuque avec de la
broche » C’est triste un singe qui
ne fait plus de grimaces…Mais d’un côté comme de l’autre, on sens que le
tataouinage achève. L’été s’en
vient. On n’a pas les moyens de scrapper
la belle saison. Les étudiants vont
retourner négocier. Accroche ton
chapelet sur la corde à linge, c’est peut-être le début de la fin qui s’en
vient. Ou bedon des élections. Va savoir!
Voilà ma belle Délia, quelques unes de nos expressions
colorées de notre truculent terroir.
C’est tiguidou? A la
revoyure!
2 commentaires:
j'adore. Surtout si on me parle avec cet accent , je fonds.
Tu parles québécois!? eh ben...je suis impressionnée! Bravo :)
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