Les morts de la R-1

C’est un cortège qui se déroule au fil des kilomètres : des fleurs et des lambeaux de tissus qui volent au vent. Des monuments érigés sur le lieu d’un accident. Il y a ce cœur de roses au milieu d’une croix, le t-shirt délavé d’un conducteur qu’on devine dans la vingtaine, une trop abondante gerbe pour marquer la perte de plusieurs êtres chers…C’est violent et tendre. Sans trop le savoir, on lève le pied en frôlant ces scènes encore habitées par les drames. Je me suis arrêtée entre Bourail et Koné pour prendre ces lieux e photos. C’était comme ça quand j’étais journaliste: quelques images pour raconter le pourquoi et le comment d’une tragédie. Ici comme ailleurs, la route tue. 51 morts en 2008. C’est beaucoup pour un si petit pays qui ne compte qu’un peu plus de 245 mille habitants. Le Québec faisait état de 557 décès pour la même année…pour une population de 7,8 millions.

En prenant ces clichés, il me semble que je revoyais les visages des mères éplorées que j’ai interviewées. Chaque fois que je croise l’une de ses croix, leur message dur contre la vitesse et l’alcool me revient. Un message qui malheureusement s’étiole comme ces bandes de tissus attachées aux monuments des disparus. Le vent finit par balayer cette marque laissée en souvenir d’une victime. Personne ne peut revenir rattacher les bout qui se détachent. Quand tout s’envole, c’est que c’est bel et bien fini.