29 déc. 2011

Le mystérieux pouvoir de la neige


J’aperçois d’un hublot le léger manteau blanc qui enveloppe le Québec tout en entier comme un voile fin.  Il me semble que j’entends Charlebois chanter « Je reviendrai à Montréal / Dans un grand Boieng bleu de mer/ J’ai besoin de revoir l’hiver/ Et ses aurores boréales… »

Quinze mots qui englobent le bonheur complexe de retrouver la neige, cette neige qu’on désire autant qu’on déteste.

Un dernier coup d’œil sur ce tableau figé et je sens les frissons dans mon cou.  Je vais avoir froid.

En Nouvelle-Calédonie, je savoure les regards épouvantés lorsque je laisse tomber avec nonchalance que chez nous, il n’est pas rare qu’il fasse moins 25. 

« Quoi?!  Moins 25? », lancent certains comme s’il prenait la mesure de l’abominable homme des neiges chaussés de bottes à poils avec talons hauts.  Je suis toujours assez fière de laisser tomber cette petite statistique sur le grand froid.  Je deviens alors la coriace « canadienne », la tough qui encaisse les journées glaciales comme un joueur du Canadien qui garde la tête haute pendant le chemin de croix des défaites.  Y’a rien là.  On va se rendre aux séries le printemps venu. 


Tout le monde sait que la meilleure façon d’affronter l’hiver, c’est de se jeter à corps perdu dedans.  Enfiler les pelures et courir un petit 5 km.  Faire de la raquette pas de mitaines avec le manteau ouvert.  Les ados rajoutent aussi celle-ci :  quelle que soit la température, ne jamais porter autre chose que des Nike ou des Vans dans les pieds.  Les bottes, c’est pour les matantes.






 Autre truc :  retirer chaussures et chaussettes et foncer dehors pour courir dans la neige. C’est la version nordique du fakir qui marche sur des charbons ardents :  on se brûle la plante des pieds en s'épivardant pendant de longues minutes comme des poules pas de tête autour de la maison.  On revient essoufflés mais gonflés à bloc, avec les petons incandescents.  Bizarre comment la neige peut vous réchauffer!







26 déc. 2011

Manteaux, manteaux!

J’ai fait ma valise pour le Québec en ne sachant pas trop ce que j’allais y mettre.  Depuis 15 mois, je ne possède qu’une paire de bottes cowboy lilas acheté chez Winners.  Pas évident de composer une garde-robe de voyage avec du lilas aux pieds…

Si ce n’étais que ça!  Je n’ai ni gros pulls, ni chaussettes (sauf celles pour aller jogger).  Un legging et deux paires de jeans.  Mon pantalon d’équitation.  Quelques t-shirts.  Voilà!  Une valise minimaliste sous le bras pour aller affronter le mois le plus froid de l’année au Québec :  janvier.

Même dilemme pour les enfants qui ont usé leur linge à la corde.  Pas trop exigeants, ces ados-là!  On roule en claquettes ici.

On est arrivé à Paris avec nos petites pelures pour se tenir au chaud.  Mais rendus chez Marie en Savoie, oups!  un mètre de neige et on était, comme le veut l’expression québécoise, « faites ». 

« Ce n’est pas grave, je vais voir ce que j’ai dans mes placards ! », nous a rassuré Marie dans un élan d’efficacité.

Telle un prestigitateur, elle a sorti une demi-douzaine de manteaux de son chapeau.  Elle dispose d’un inventaire impressionnant ce qui lui a permis de tenir un pari ambitieux :  habiller une famille néo-calédonienne de 5!

Nous étions, disons les choses simplement, assez « colorés ».  Un « one-piece » rouge pompier pour moi, un manteau Coca-Cola pour Lulu, un pantalon chaud pour Princesse des îles… On a acheté quelques articles chez Décathlon.  Nous n’avions pas la dégaine des touristes russes richissimes qui posent à Courchevel mais on avait la classe d’avoir des amis incroyablement généreux qui ont non seulement hébergé une famille dans leur chaleureuse maison en fournissant couverts et bon vin…Ils ont aussi eu un cœur assez grand pour ouvrir leurs placards et nous habiller de pied en cap.







Marie la magicienne!
Voici les meilleurs moments de cette séance « manteaux-manteaux »!

25 déc. 2011

BONNE fêtes....et sachez digérer le petit écart avec le bon usage des règles du pluriel. 
Quand est-ce qu'on arrive?

« On part quand au Québec? »

Une question posée plusieurs fois par semaine, multipliée par trois enfants.  Presqu’un refrain auquel je répondais invariablement :

« On part le 17 décembre pour la France.  On y passe 5 jours.  On reprend l’avion le 23 et on arrive pile pour Noël chez nous».  J’ai décrypté les dates, refait l’itinéraire sur un tableau imaginaire, remâché la réponse en y ajoutant le petit « wooh hoo! » pour apaiser le bouillonnement de mes trois chéris.

À une semaine du départ, ils ont chacun leur tour émis un commentaire plutôt…étonnant :

« Pourquoi on va en France?  On devrait aller directement au Québec! », dissertent-ils lorsqu’il est question des grandes vacances.

Je reste bouche bée.  C’est comme si le Grand Antonio repoussait son assiette pour dire qu’il était repu. 

Mes enfants lèvent le nez sur la France!  Cette France que j’aime, que je chéris, qui me plonge dans la nostalgie de ma petite année passée à Strasbourg.

Pour eux, il s’agissait plutôt d’un fossé à franchir avant les grandes retrouvailles.  Une interlude imposée avant de plonger dans le tourbillons de la bande d’amis.  Un détour où ils s’imaginaient en train de ronger leur frein en chiquant un bout de baguette.

Mais sitôt arrivés en France, mes trois ados ont vite fait de mettre le Québec en veilleuse.  C’était le Walt Dysney du patrimoine :  dès le premier château de la Loire perchée sur une colline, les écouteurs du Ipod sont tombés et les exclamations ont fusé.   

Ils n’oublieront pas de sitôt leur baptême de l’Hexagone :  nous avons logé chez des amis, Marie et Xavier, eux-mêmes à la tête d’une petite tribu de trois garçons âgés de 8 à 12 ans. 
Ski dans les Alpes, promenade à Lyon et tablées bien animées.  Tous les ingrédients d’un beau voyage.  


















23 déc. 2011

Pause-Québec: Gougounesettalonshauts part en raquettes!


Il y a 15 mois, j’ai eu la chance inouïe de mettre ma vie professionnelle entre parenthèses.  Je suis passé d’un statut de journaliste sautillant d’un deadline à un autre à une occupation beaucoup plus contemplative :  retraitée technique et blogueuse récréative.  Il m’a fallu quelques semaines, voire même quelques mois, pour m’imbiber de ce nouvel état zen.  La position du lotus et le salut au Soleil n’ont pas suffit à me révéler immédiatement les riches couleurs de la cultures mélanésiennes dans laquelle j’évoluais.  Je suis encore une touriste qui bat des mains en comptant les bébés requins du lagon mais je compte bien graduer au cours des deux prochaines années au rang des « aventurières ».  Je veux franchir les pans de ce décor luxuriant pour entendre battre le cœur des gens.  


J’ai conscience en ce moment de traverser une forêt enchantée, un espace foisonnant où les expériences sont toutes aussi étonnantes et colorées.  Je m’étonne de cette plénitude du monde kanak tout en tirant une leçon sur la simplicité de leur mode de vie. 


Je m’apprête à prendre un peu de recul pendant les prochaines semaines en passant cinq semaines au Québec.  Je vais prendre un bol d’air sur le bord du fleuve où nous avons loué une maison.  Le programme ne tient qu’à quelques lignes :  jogger, trinquer, rire et dormir. 
Mon blog n’entrera pas en hivernation pour autant.  Gougounesettalonshauts va vadrouiller en bottes et en raquettes.  J’arrive alors que le Québec est en panne de neige mais je vais quand même flâner tout en gardant les yeux grand ouverts.

15 déc. 2011

Bouboule au pays de la Loyauté

Vous vous souvenez de ma chienne Bouboule?  La crapaude va bien.  Elle vit sur le petit domaine fleuri d’Anne-Marie avec une meute d’une demi-douzaine de chiens, à deux pas de la tribu de Koniambo. 

C’est la plus élancée, la plus racée et la plus gueularde.  Elle jappe en fourrant son museau dans la paume des visiteurs comme pour leur dire, « c’est moi la star, c’est moi la star, c’est moi la star! ».

Assis Bouboule!  Donne la patte!  Et la voilà qui s’exécute, fière de montrer qu’elle a encore des manières.

Nous sommes allés la kidnapper pendant une demi-journée pour le rappel de ses vaccins.  Elle a pris sa position habituelle dans la Dacia, les deux pattes sur le siège arrière pour que je puisse voir sa bouille de clown dans le rétroviseur.  Vous allez me dire que je suis un peu étrange mais je crois qu’elle s’est fendue d’un sourire.

Elle a posé ses longues pattes fines sur la balance du vétérinaire :  13 kilos.  Wow!  Comment a-t-elle pu grossir alors qu’elle est taillée comme un maringouin? 

Revenue à la maison, elle s’est couchée sur le bord de la porte.  Le temps s’est arrêté.  Je me suis remise à discuter de tout et de rien avec la bête à poils.   

Lorsqu’elle est retournée auprès de sa nouvelle maîtresse sur l’heure du dîner, elle s'est pressée contre elle pour me prouver qu’elle avait réussi à se refaire une vie de chien.

Je suis retournée hier à Koniambo pour ramener Anne-Marie chez elle.  Bouboule a foncé droit sur moi en fourrageant son museau dans ma main.  J’ai fait pleuvoir les caresses pour calmer sa frénésie puis, je suis remontée dans ma Dacia.  Tous les chiens de la meute m’ont regarder filer sur le chemin.  Tous sauf…Bouboule.  Mon hyper-active a commencé par cabrioler avec vacarme  pour dire au revoir.  J’accélère pour finalement atteindre 50 km/hr et elle galope toujours comme une antilope.  60 km/hr et elle ne flanche pas.  Il y a de la détermination dans sa foulée, l’air de dire, « je n’ai jamais vu neiger mais je sais comment la semer celle-là! »  Ma cabochonne dans le miroir de mon rétroviseur a l’œil vissé au mien. Ce regard me donne toute la mesure de sa loyauté.  Au bout de deux kilomètres, je me range sur le bord de la route, j’ouvre la portière arrière et Bouboule reprend sa place habituelle, les deux pattes accrochées au dossier.

Demi-tour vers Koniambo.  Loin d’être ébouriffée par son sprint, elle retourne au milieu de sa meute, fraîche comme une rose.  Anne-Marie secoue la tête :  elle n’a pas fini de lui en faire voir de toutes les couleurs, celle-la!

13 déc. 2011


                                            La petite histoire de Roes

Ce n’est pas d’hier que la Nouvelle-Calédonie accueille les expatriés.  Laissez-moi vous raconter l’histoire des Vérons.

Dans les années soixante, la famille se laisse tenter par l’aventure dans le Pacifique.  Le clan boucle ses valises et dit adieu à son patelin du nord de la France.

Parmi les enfants, Monique, 11 ans.  Entourée de ses frères et sœurs au port de Marseille, elle embarque sur un grand paquebot.  Au loin, la ville du soleil n’est plus qu’un point blanc lumineux qui finalement disparaît.  Ce sera son dernier regard vers sa patrie. 

La petite tribu mettra 45 jours pour accomplir cette grande traversée vers le caillou.  Monique  garde un souvenir heureux de ce voyage émaillé de rires et de jeux comme dans un film de Marcel Pagnol.

Toute la famille débarque à Nouméa pour un bref passage.  Puis, après court séjour à Bourail, c’est dans la province nord, plus précisément à Koné, qu’ils posent définitivement leurs valises.

Koné n’est alors qu’ une minuscule bourgade qui ne compte que deux magasins.  La famille de Monique arrive au bon moment :  il y en a justement un qui attend un repreneur. Nous sommes en 1972.

Pas de publicité, que du bouche à oreille :  on fait désormais ses courses chez Vérons.  Ne cherchez pas l’enseigne, tout le monde connaît.

Au même moment où la famille prend racine à Koné, Monique rencontre celui qui deviendra son époux,  un certain Roes.  Elle a alors 18 ans.

En 1980, Papa Vérons est bien établi dans la commune et il juge que le temps est venu de passer le flambeau à sa fille Monique.  Une nouvelle ère commence et on pose le nom du jeune couple sur une enseigne:  ROES.  La peinture s’est écaillée depuis mais les affaires ne se sont jamais effritées.

Le clan Roes a grandit : quatre enfants et six petits-enfants, tous tricotés serrés.  Monique n’a jamais senti le besoin de retourner dans sa France natale.  Sa vie est ici et les projets sont nombreux.  Comme son père l’a fait 30 ans plus tôt, elle et son mari passeront le flambeau.  

Le magasin sur la rue Principale sera démoli dans quelques semaines.  La fin?  Bien sùr que non!  Il s’agit d’un nouvel envol.  Cette vénérable devanture fera place à des logements et à deux autres magasins, dont un appartient à son fils.  Le marché d’alimentation sera réouvert sur l’autre coin de rue, en face de Koné Centre. 

Je termine en vous confiant ceci :  alors qu’elle était sur le paquebot, la jeune Monique n’a jamais regardé la ville du soleil disparaître à l’horizon. Elle jouait sur le pont lorsque Marseille s’est évanoui dans la Méditerranée.  Mais elle a lâché ses poupées pour scruter longuement le profil du Caillou au terme de son long périple de 45 jours en mer.  Les massifs de la Nouvelle-Calédonie se sont alors imposés  à elle dans toute leur splendeur, lui révélant que tout était possible ici.  Et je crois qu’elle n’a jamais oublié cette vision.
                       La corde à linge à longueur d’année

La cordée de bobettes 12 mois par année, n’est-ce pas là le vrai bonheur calédonien? 

Cuisiner en se faisant surprendre par un gecko miniature accroché dans la botte de persil et rire à en perdre le souffle…

Ne plus avoir à porter des cols roulés.

Sourire quand il mouille et se dépêcher d’enfiler ses baskets pour aller courir sous cette douche improvisée.

Y’a pas d’soucis, mon kiki.

Combien de fois vous ai-je dit que c’était paradisiaque, le Pacifique?  La mer, le lagon, l’abondance des sourires.  S’il y avait un Winner’s et un Pharmaprix, je pense que je ne déménagerais plus.  Le paradis pour l’éternité.

Mais l’éternité, y’a des fois où c’est très long.

Ça commence subtilement.  Je me surprends au beau milieu d’un moment d’insouciance, celui  où «la maîtresse de la maison » attrape son verre de rouge en se demandant quel jour on est… et on est lundi, sacrament! 

Lundi!  Je me souviens très distinctement des lundis.  Pas les lundis où on empoigne le fouet pour s’autoflageller en faisant des stops américains jusqu’au boulot, en se rongeant les ongles tout en appliquant son mascara dans le rétroviseur pour finalement s’apercevoir qu’on a l’air d’Amy Whinehouse à 8 heures et quart du mat ‘.

Non, je ne vous parle pas de ces matins là.

Je vous parle des lundis gonflés à bloc avec l’agenda qui déborde.  Les lundis qui commencent en lion.  Le téléphone qui sonne et qui vous donne envie de danser comme dans un clip de Behoncé.  La première gorgée du café Tim Horton juste avant de lancer votre combinaison aérobique de bonjours et de bises à la ronde.  Les lundis où vous sortez votre nouveau power kit avec la paire de talons canons.

Ces lundis là…

Ce jour-là n’existe plus sur mon calendrier.  Pas depuis que je suis expatriée, femme de Chéri.  Ce n’est pas sa faute, c’est moi qui ai signé un engagement stipulant que je n’allais pas travailler.  Vous imaginez?  J’ai signé un contrat pour me retrouver dans un vieil épisode de  "Papa a raison".  J’écume ma pile de « Living » de Martha Stewart et je cuisine des desserts avec des kilos de beurre arrosé de lait concentré sucré.  JE N’AI JAMAIS FAIT ÇA DE MA SAINTE VIE AVANT!! 

C’est étrange comment j'emploie tout ce temps libre à détricoter méthodiquement  mes beaux projets d’écriture, mes photo-reportages et autres safaris sociologiques qui devaient propulser ma nouvelle carrière de « free lance »  (« libre de glander », ça doit être ça la traduction…) dans la stratosphère professionnelle où gravitent Oprah, Laurence Ferrari  et Sophie Thibault.

Lorsque je m’assoie, j’entends la laveuse qui claironne pour m’annoncer qu’il y a une brassée prête pour décorer la corde à linge, un frigo vide (et sale) qui doit être ravitaillé et trois enfants avec des horaires de premier ministre qui attendent d’être conduits d’un bout à l’autre de Koné.

J’aime mes enfants plus que mon cellulaire de fonction, c’est vrai, mais laissez moi dire une chose aussi éhontée qu’ahurissante :

Ce cellulaire me manque!

Voilà, c’est dit.  Ce cordon à la vie professionnelle n’existe plus, il est bel et bien rompu pour encore quelques années et il faut s’y résoudre.  Prendre une pause peut s’avérer être une expérience douloureuse mais oh, combien nécessaire.  Se balancer ainsi dans le vide fait terriblement peur.  Mais c’est ainsi perchée entre deux vies qu’on déploie une nouvelle assurance.  Il y a encore un plancher sous mes pieds même si je ne touche pas un chèque de paie.  On partage les tunes de Chéri, c’est choc, non?

En apnée pendant 3-4 ans…Je pense que je vais devoir me faire greffer des branchies si je veux passer à travers cette pause-carrière. 

Rester zen.  Décrocher enfin ce certificat bidon en ressources humaines à Teluq.  Peindre des faces de clowns et les offrir à tous mes amis.  Tisser des liens en me lançant dans la vente de Tupperware.  Et pourquoi pas?  Apprivoiser les subtilités du télémarketing.  Il y a tant de défis à relever en attendant de retourner dans l’arène des médias.

Mais d’ici là, je pars dans moins d'une semaine en vacances au Québec en faisant un petit détour par la France.  Je suis crevée et j'ai besoin de repos ;)

4 déc. 2011

L'ennui

Vous avez déjà fait connaissance avec l’ennui?  Vous savez, l’ennui profond, l’ennui des dimanches pluvieux et des rues désertes, l’ennui de la disette télévisuelle et de la pénurie d’amis, l’ennui en pleine panne internet…Rien ni personne pour vous tirer de cette torpeur anesthésiante.

On appelle ça l’ennui mortel, c’est peu dire.  Avec un tel épithète, pas étonnant que ça fasse peur.  Et ne comptez pas sur un centre d’achat ni même un complexe de cinémas à 22 salles pour fuir votre ennemi.

Planquez-vous et endurez.  Nous sommes ici à Koné.

Mes enfants ont développé une formidable forme de résilience face à cet état de torpeur.  Ils arrivent à respirer malgré la lourdeur de la chape de plomb. 

Lors d’un petit weekend à Nouméa, Clopinette s’est retrouvée avec des copains qui vivent en ville.  Des ados branchés qui ont pour terrain de jeu l’Anse Vata et la Baie des Citrons. 

« Mais qu’est-ce que tu fais les samedis soirs à Koné? », lui demande l’un d’eux, perplexe devant le mode de vie d’une broussarde de 14 ans et demi.

« On s’organise entre amis, on loue des films sur internet, on fait des fêtes… », synthétise ma jolie Clopinette.

Elle aurait aussi pu ajouter qu’il lui arrive de ne rien faire.  Rien du tout.  Elle se laisse bercer tout doucement par l’ennui en écoutant de la musique, en lisant un livre ou encore en feuilletant un vieux Cosmopolitan. 

Lulu traîne quant à lui sa carcasse jusqu’au rond point et fait du skate pendant une couple d’heures.  Il peaufine les « darkside grind », « 360 pop shuv it », « laser flip » et autres figures inspirantes.

Princesse des îles se lance dans la rédaction d’un roman, rien de moins.  Je la vois penchée sur son bureau, noyée dans son labeur, tricotant les dialogues. 

Ça me rassure de les voir dompter l’ennui.  Je ne les entends pas me saouler avec des "maman, je ne sais pas quoi faire!!! ". 

Ils suivent le conseil à la lettre :  se planquer et endurer.

Bravo, vous irez loin mes chéris!