4 août 2011










J’étais là avant le scrapbooking

Dans mon inventaire des trucs inutiles et inestimables se trouve un panier plein de calepins gribouillés.  Il était hors de question que je parte m’établir en Calédonie sans ma petite pile sous le bras.  Ça fait partie des trucs qui me tiennent tellement à cœur que je n’hésiterais pas à bondir dans une maison en flammes pour les récupérer.  Il va s’en dire que Bruce Willis n’est pas loin dans mon délire pour me faire braver les éléments afin de sauver mon trésor.

Il y a un calepin là-dedans qui ne me rajeunit pas : 1983.  C’était l’époque glorieuse du disco.  Madonna avait 25 ans et moi, quelques années de moins.  C’était un journal intime avec des pages et des pages de questionnements existentiels.  Qui suis-je?  Où vais-je?  Y a-t-il quelqu’un qui pourra un jour m’aimer?  Ce calepin là a toujours senti le moisi.  Chaque fois que je l’ouvre, son odeur un peu âcre me rend nostalgique.  Il reste donc toujours bien planqué sous la pile.

Les autres calepins sont plus jojos.  Ils célèbrent la vie.  Les tribulations en Europe, ma première job à la radio, mon mariage, mes déménagements, la naissance de mes enfants, l’adoption de Princesse des îles, les anecdotes croustillantes de soupers de sacoches, quelques coups de gueule et les bizarreries de la vie.  Sans oublier mes dessins (moi qui dessine pourtant comme une guenon à qui on filerait des prismacolors), mes photos, mes coupures de revues de décoration.  Tout ça, c’était avant l’avènement du Scrapbooking.  J’oserais même écrire le « fucking scrapbooking »,  cette mode qui consiste à faire des titres, à accrocher des rubans autour d’une photo de pantoufle de bébé et à saupoudrer de sable le compte-rendu des vacances à Old Orchard.  Une façon ordonnée, réfléchie, léchée de coucher des pensées pré-digérées.    Peut-être n’ai-je pas compris parce que je ne me suis jamais lancée dans les ateliers du bonheur carton-pâte qui se donnait pas très loin de chez moi… J’ai opté pour le calepin bordélique sur lequel je griffe plus que je n’écris. 

Cette semaine , j’ai ressorti le panier de calepins pour m’y replonger.  La vie est riche de petits détails lorsqu’on les consigne au fil des jours.  La recette de spaghetti bolognaise qui côtoie la photo de Lulu hurlant dans son premier costume d’Halloween (il se faisait peur, le pauvre!).  Les blues de la mère en congé de maternité et la liste d’épicerie.  Le spécial « Résolutions du jour de l’an » et les dessins des bébés.  Et dans la liste des choses désirées et espérées dressée en 2008, cette mention qui en dit long :  « aller vivre en Nouvelle-Calédonie »

Un vœu qui a fini par se réaliser.  Je crois bien que mes calepins sont magiques.  C’est sans doute pour ça qu’ils me tiennent tant à cœur.

Aucun commentaire: