17 nov. 2012

Mon nom est Mom...Super Mom.

Ça se promène bras dessus, bras dessous dans les couloirs de l’hôpital.  Ou il y en a un qui pousse et l’autre qui roule.  Un inquiet et l’autre malade.  Le bien portant et le mange misère.  Qui vous accompagne lors du voyage organisé au pays des fiévreux?  Votre meilleure amie, votre fille, votre belle-sœur, votre cousin?

Dans mon cas, la question ne se pose même pas, c’est ma mère. 

« On va aller te chercher un fauteuil roulant… », insiste-t-elle.

Mom!  Je roule les yeux en l’air et je prends mon air buté d’enfant de 4 ans.  Pas le fauteuil roulant!  Et puis quoi encore?  Tu vas me moucher avec la manche de ton chandail et me nettoyer le bord de la bouche avec ta salive?  Le simple mot "non" n’atteint pas à ses oreilles.  C’est comme si je lui disais « sacre moi patience » en mandarin. 

Préposé?  Apportez la chaise roulante.   Au concours de l’entêtement, c’est ma mère qui gagne haut la main.

Elle me fait asseoir dans le fauteuil, fière d’avoir dompté la bête.  Même au bout d’une journée de treize heures à l’hôpital, ma mère est capable de pousser avec l’assurance d’un conducteur de F-1 et savourer son triomphe.

Le croirez-vous, en septembre dernier j’ai jonglé avec l’idée de ne pas dire à ma mère que j’avais le cancer.  C’est une idée folle qui m’a traversé l’esprit.  Un peu débile, non? 

La force surhumaine des mères est un mythe.  Même Dieu peut être infaillible avec certains dossiers.   Pourquoi pas ma mère?

C’est ancrée dans leur gêne, cette douleur sourde lorsque leur enfant a mal.  Je voulais simplement lui éviter ce sentier vertigineux. Je vous avoue que ma mère a beaucoup donné dans ce département.  Je suis née avec une malformation congénitale rare, une ectopie rénale, et j’ai vu ma mère littéralement souffrir à ma place.  Avez-vous déjà vu un clown rire et pleurer en même temps?  Ma mère faisait tout ça pour me rassurer malgré son impuissance.  Elle a soufflé sur mes bobos avec une douceur infinie jusqu’à me faire oublier la brûlante souffrance des infections urinaires à répétition.  Elle m’a couvée soir et matin pendant un mois d’hospitalisation.  Une fois guérie, du haut de mes presque quatre ans, j’ai décidé que je n’allais plus jamais être malade pour ne pas inquiéter ma belle maman d’amour. 

Au lieu de ça, je l’ai fait damnée…J’ai fait les 400 coups.  J’ai dansé sur la table du salon en écoutant Donald Lautrec Show, fait des fugues dans le bois, caché des chiots sous mon chandail, lancé des cailloux au voisin, bardassé ma petite sœur, fumé en cachette.  Regarde maman, je ne suis pas malade, je suis en vie.

Pauvre maman!  Encore obligée de souffrir cette peste aujourd’hui devenue une femme de 48 ans. 

mom et sa petite-fille
Pas moyen de faire une fugue quand on a un cancer, même pour se cacher de sa mère.  Au lieu de faire l’enfant, je devrais grandir un peu et souffler à mon tour ces mots si simples qui font disparaître la souffrance.

Merci maman.  Je t’aime très fort.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bonjour Chantal, c'est avec beaucoup d'émotion que j'ai lu ton dernier article.
On ne se connait pas, mais je lis tes aventures depuis quelques temps déjà, au delà d'une année.
Alors j'ai l'impression de te connaître un peu à travers tes aventures.
Tu es une femme formidable et pleine de vie.
Je t'envoie toutes les ondes positives possibles et je pense fort à toi et à tes proches.
Amicalement,
Emilie